Historique
Jusque dans les années 1970, le transport tactique soviétique était essentiellement assuré par les appareils de l’avionneur Antonov, notamment la série des Antonov An-24, An-26 et An-30. Tous ces appareils étaient propulsés par des moteurs à hélices. Aussi, l’apparition à la fin des années 1970 d’un Antonov équipé de moteurs à réaction fit-elle sensation. Et plus encore que sa motorisation, c’était son aspect même qui retint l’attention de nombreux observateurs.
Au début des années 1970, l’
US Air Force avait lancé un programme nommé
Advanced Medium STOL Transport (AMST). Ce programme, suivi de près par l’agence spatiale américaine, la NASA, avait pour objet la conception d’un appareil de transport tactique, utilisant les théories développées par le génial ingénieur aérodynamicien roumain Henri Coanda. Deux appareils prirent part à la compétition, remportée par le Boeing YC-14. Malheureusement, l’US Air Force estima finalement plus utile de renforcer sa flotte de Lockheed C-130 Hercules et d’investir dans le transport stratégique, avec le C-17 Globemaster III.
Curieusement, l’Antonov An-72 ressemblait quelque peu au Boeing YC-14. Il est possible que les Soviétiques soient parvenus à se procurer des données sur le projet, et notamment sur le concept
Upper Surface Blowing : ce procédé consistait à envoyer l’air éjecté par les réacteurs sur les extrados de l’aile, ce qui permettait d’excellentes performances en matière de décollage et d’atterrissage court (ADAC).
L’Antonov An-72 décolla pour la première fois le 22 décembre 1977. Mais il fallut ensuite près de huit années aux Soviétiques pour en lancer la production en série, dans l'usine de Kharkov en Ukraine. Cette production tardive explique que seuls un peu plus de 200 exemplaires aient été produits, les premiers entrant en service aux alentours de 1985. Une chaîne de production fut installée en Russie en 1993, à Omsk, mais peu d’appareils en sont sortis : selon les données fournies par le Ministère russe de l’Industrie et de l’Énergie pour les années 2002 à 2004, 2 appareils en 2002 et 1 seul en 2004. Aussi peut-on considérer aujourd’hui l’An-72 comme un appareil ukrainien.
L’Antonov An-72, baptisé
Coaler par l’OTAN, est très représentatif de la production soviétique. Il s’agit d’un bimoteur à aile haute et légèrement en flèche, avec un empennage en T. Il a été conçu pour effectuer des missions de transport tactique, partout et par tous les temps. Pour affronter tous les terrains possibles, le
Coaler dispose d’un train d’atterrissage comportant deux doubles jambes à roues indépendantes s’escamotant dans deux petits carénages latéraux et d’une jambe avant à deux roues.
Les deux moteurs sont installés sur l’aile, ce qui réduit considérablement les risques d’absorption d’objets ou de sable au sol. Le déchargement des cargaisons s’effectue par le biais d’une porte arrière et d’une rampe, celle-ci formant un angle de 15° avec l’appareil quand elle touche le sol. La soute est haute de 2,20 mètres, large de 2,50 mètres (2,15 mètres au sol, en raison des carénages latéraux) et capable de transporter 7,5 tonnes de fret, ou 52 passagers.
De part et d’autre de la porte arrière, deux ailerons latéraux ont été installés. Ils sont destinés à réduire les turbulences près de la queue, et autorisent le largage de parachutistes ou de caisses soutenues par des parachutes. Pour assurer la meilleure capacité ADAC possible, l’An-72 est équipé de volets hypersustentateurs à double fente et de becs sur toute la longueur du bord d’attaque. Il est ainsi en mesure de décoller sur de très courtes distances. Ainsi pourvu, le
Coaler est un appareil de transport tactique remarquable, qui aurait pu faire une belle carrière si l’Union Soviétique ne s’était pas écroulée en 1991.
Outre la version de transport, Antonov travailla sur d’autres versions, parfois très originales eu égard à la vocation première de l’An-72. Mais le gros du travail porta sur la conception d'une version améliorée du
Coaler, l’An-74, à partir de 1986. Ce dernier fut à l’origine étudié pour servir dans les milieux arctiques, dans le nord de l'Union Soviétique. Les représentants d’Antonov ne se privent pas d’indiquer que cet appareil peut opérer à des températures allant de – 60 à + 40 degrés Celsius, ce qui peut se vérifier aisément par l’activité de plusieurs
Coaler dans les champs d’hydrocarbures de la compagnie
Gazprom, près du Cercle Polaire.
L’An-74 ne diffère dans son allure extérieure de l’An-72 que par d’infimes détails, comme la présence d’une vitre bombée de chaque côté de l’avant du fuselage. Il est également un peu plus lourd, les variantes An-74TK et An-74T ayant une masse maximale au décollage de 36,5 tonnes. Les vraies différences se situent ailleurs. L’avionique de l’An-74 est plus moderne, ceux actuellement proposés à la vente incorporant ainsi des systèmes de navigation par satellite et un cockpit tout écran. L’équipage peut aussi être réduit à quatre personnes.
C’est surtout au niveau des performances que l’An-74 se distingue de son ainé. L’An-74T-100 de transport (ainsi que l’An-74TK-100 fret/passagers) peut emporter jusqu’à 10 tonnes de fret sur près de 1 500 kilomètres, là où l’An-72 transportait 7,5 tonnes sur 860 kilomètres. La version AN-74-200D de transport VIP dispose même d’un rayon d’action de 5 000 kilomètres. Ces nouveaux appareils se vendent plutôt bien à l’exportation, tirant profit de leurs qualités intrinsèques, mais aussi de leur prix à l’achat : on estime qu’un An-74 neuf vaut à l’heure actuelle entre 15 et 20 millions de dollars, soit environ un tiers de moins qu’un C-27J.
Les principaux utilisateurs militaires du
Coaler sont actuellement la Russie (une vingtaine d’appareils) , l’Ukraine (une dizaine opérationnels sur les 26 récupérés en 1991) et l’Iran (11). Au 01/12/2004, selon l’agence fédérale russe chargée des transports, 32 An-74 étaient répertoriés dans la flotte civile russe, dont 20 répertoriés comme utilisés par une compagnie aérienne.
Récemment, on a appris que l’Ukraine avait conclu la vente de 10 Antonov An-72 à l’Irak, ce qui démontre une fois encore que l’An-72/74 a encore un rôle à jouer sur le marché mondial des appareils de transport tactique.
Versions principales :
- An-71 : surnommé ironiquement AWACSki, qui aurait dû notamment équiper les porte-avions soviétiques, mais on lui préféra le Yakovlev Yak-44, finalement lui aussi abandonné. Équipé d’un radar
Kvant de 360 kilomètres de portée, monté sur un rotodôme, d’un moteur supplémentaire dans le fuselage et embarquant trois opérateurs radar. Trois prototypes construits
- An-72 : version de base, également appelée An-72A
- An-72P : variante utilisée par les garde-frontières russes et ukrainiens, équipée d’un canon GSh-23 de 23 mm en pod ventral et de charges sous les ailes (bombes ou roquettes), spécifiquement dédiée à la patrouille et à la recherche et au sauvetage
- An-72R ( An-88 ? ) : variante équipée d'un radar à balayage électronique monté sur les flancs. Trois exemplaires produits
- An-74 : version améliorée de l’An-72, développée au départ pour une utilisation en conditions polaires ; base pour de nombreuses sous-variantes vendues à l’exportation
- An-74TK-100/200 : version de transport mixte, 52 passagers et/ou 10 tonnes de fret, avec un équipage de 2 à 4 personnes
- An-74T-200 : version de transport améliorée, développée au départ pour l’Egypte
Pays utilisateurs
Anciens pays utilisateurs