Historique
Franchement déçu par le P-59 et ses performances très médiocres, l'USAAF se tourne vers Lockheed pour concevoir un avion de chasse propulsé par un unique réacteur Halford H-1B. Celui-ci accepte et initie le projet L-140, une extrapolation du L-133 abandonné quelques années plus tôt. L'USAAF accepte le projet en juin 1943 et passe un contrat en octobre 1943, avec une redoutable contrainte : le prototype doit voler dans 180 jours, exigence due à l'apparition du Me-262.
L'équipe placée sous la direction de Clarence "Kelly" Johnson, les fameux "Skunks Works", se met au travail dans le plus grand secret et réussit son pari. Le XP-80 "Lulu Belle" fait ses premiers essais au sol après 143 jours, en décembre 1943, mais un problème technique dû au réacteur endommage le prototype. Le premier vol a lieu le 8 janvier 1944 aux mains de Milo Burcham, vol au cours duquel il n'hésite pas à se lancer dans des acrobaties à faible altitude ! Il sera le premier avion américain à dépasser les 800 km/h en palier au cours des essais.
Le L-141, développé comme solution de rechange alors qu'Allison rencontrait des problèmes avec la mise au point du réacteur H-1B, est un P-80 agrandi et conçu autour du General Electric I-40, le futur J33 construit par Allison. Celui-ci a donné naissance à 2 prototypes. Le monoplace, nommé "Grey Ghost" du fait de sa peinture grise, a volé le 10 juin 1944. Le biplace, surnommé "Silver Ghost" en raison de son absence de livrée, en août. On se rendit rapidement compte que la peinture altérait les performances et on opta pour la fameuse livrée "alu" caractéristique du début de la guerre froide. Les essais menés avec les bidons en bout d'ailes montrent que ceux-ci n'ont aucune incidence sur la trainée.
13 YP-80A, les appareils de présérie, furent commandés en mars 1944 et livrés en septembre de la même années. Mais 5 d'entre eux furent perdus au cours des essais, principalement à cause d'erreurs humaines. L'un d'eux causa la mort de Milo Burcham le 20 octobre 1944.
2 d'entre eux furent envoyés en Italie et 2 autres en Angleterre début 1945, mais ne virent pas le combat aérien, cloués au sol à la suite d'un accident.
La première commande concernait 1000 appareils, et un avenant prévoyait 2500 exemplaires supplémentaires. La fin de la seconde guerre mondiale fera baisser le nombre total de commandes.
Le P-80A, équipé d'aérofreins ventraux, entra en service en février 1945 au sein du 42nd Fighter Group. Leur carrière fut émaillée de nombreux accidents et leurs performances tout-à-fait médiocres. Richard Bong lui-même, alors pilote d'essai chez Lockheed, se tua à bord d'un P-80 le 6 août 1945. Une trentaine de P-80 furent envoyés dans le Pacifique, mais trop tard pour participer au conflit contre le Japon. Il fut construit à 524 exemplaires. Les 344 premiers exemplaires étaient des Block-1-LO propulsés par un J33-GE-11 de 1746 kgp. Les 180 suivants, étaient des Block-5-LO équipés d'un J33-A-17 de 1814 kgp. Les livraisons se terminèrent en décembre 1945.
152 appareils seront construits pour des missions de reconnaissance sous la dénomination RF-80A (Block-15-LO), auquel il faut ajouter 66 F-80A modifiés. Ils dérivaient du XF-14, un YP-80A transformé, qui s'était écrasé le 6 décembre 1944.
Le P-80B entra en service en mars 1947, il était équipé d'un siège éjectable, d'un radio-compas, et d'une injection d'eau-méthanol servant à augmenter la puissance du réacteur. Le F-80B a des ailes plus fines et plus résistantes, et peut emporter des conteneurs de roquettes. 240 exemplaires furent construits, dont 209 Block-1-LO et 31 Block-5-LO. L'un d'entre eux fut modifié en P-80R pour battre un record de vitesse, ce qui fut fait le 19 juin 1947 lorsqu'Albert Boyd franchit les 1000 km/h.
Le P-80C vola en mars 1948, il se caractérisait par une version plus puissante du J-33. Il fut construit à 927 exemplaires, dont 129 F-80A convertis au standard F-80C Block-11-LO. 50 d'entre eux furent cédés à l'US Navy sous la dénomination TO-1, puis TV-1 à partir de 1950. Ils furent utilisés au sein du VF-52 et du VMF-311.
76 F-80A, RF-80A et F-80C furent modifiés en RF-80C pour la reconnaissance. 75 appareils furent convertis en drônes sous l'appellation QF-80C dans les années 1950.
Sa version biplace TF-80C donnera naissance au fameux T-33 et au F-94 Starfire, que nous développons par ailleurs. C'est à partir de la mi-juin 1948 que le P-80 sera renommé F-80.
Au total, ce sont 1714 P-80 sans compter les prototypes, qui seront construits jusqu'en 1950. Le prix unitaire revenait approximativement à 100 000 dollars 1947. En juillet 1948, 16 F-80 du 56th Fighter Group ont effectué la traversée de l'Atlantique d'ouest en est.
Le F-80C a servi pendant la guerre de Corée, où il effectuera 15000 sorties en 4 mois. Mais l'arrivée du MiG-15, malgré une victoire contre cet appareil en novembre 1950, l'a rendu complètement obsolète. Il revendique 17 victoires air-air et 24 avions détruits au sol, dont 6 MiG, pour la perte de 277 appareils dont 14 abattus par l'ennemi. Dès lors, il sera cantonné aux missions d'attaque au sol et à la reconnaissance.
Retiré des premières lignes dans les années 1950, il sera finalement réformé en 1958. Il connaitra une seconde jeunesse en Amérique latine jusqu'en 1974, date à laquelle les derniers F-80 chiliens seront définitivement retirés du service. A part 32 F-80A vendus au Brésil, les livraisons concernaient surtout des F-80C : 18 au Chili, 15 en Colombie (dont 9 s'écraseront), 18 en Equateur, 14 au Pérou et autant à l'Uruguay. Cuba devait également en recevoir 13, mais l'arrivée au pouvoir de Castro fit annuler la commande.
Texte de Clansman.
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