Historique
A la mi-1917, il devint évident que les Nieuport 17 et 24Bis étaient dépassés par les nouveaux chasseurs allemands. Le premier avait d'ailleurs été remplacé par le Spad S.VII.
Le Nieuport 28 fut conçu par Gustave Delage dans la droite ligne de ses précédentes créations, c'est-à-dire un appareil sesquiplan léger et très manœuvrant. son moteur Gnome 9N rotatif et monosoupape de 150 cv était plus puissant, il emportait 2 mitrailleuses Vickers 0,303 au lieu d'une et disposait d'une nouvelle aile. Seules les ailes basses disposaient d'ailerons. Les mâts reliant les ailes étaient parallèles et non plus en V, les bouts d'ailes étaient arrondis. Le fuselage était de section circulaire.
Il vola pour la première fois le 14 juin 1917. Plusieurs prototypes furent construits, notamment pour tester différentes ailes supérieures, ou encore pour tester d'autres moteurs tels que les Hispano-Suiza 8Fb de 300 cv, Le Rhône 9R de 170 cv, Lorraine-Dietrich 8Bd de 275 cv et le Clerget 11E de 200 ch. L'un d'eux testa également un fuselage en bois monocoque. Toutes ces expérimentations menèrent au Nieuport 29.
Le Nieuport 28C.1 entra en service début 1918, mais à cette époque le Spad XIII était déjà le fer de lance de l'Aéronautique Militaire. Pour la France, le Nieuport 28 faisait doublon. L'United States Army Air Service préférait également le Spad XIII, mais il n'y avait pas assez de moteurs disponibles : le Nieuport 28 fut donc proposé à l'AEF (American Expeditionary Force) comme solution d'intérim.
Les 94th et 95th Aero Squadron reçurent leurs premiers Nieuport 28 à la mi-février 1918, mais dépourvus d'armement. Les Américains se lancèrent d'abord dans de vols de familiarisation jusqu'à la mi-mars, lorsque les mitrailleuses Vickers furent disponibles. Les Nieuport 28 équipèrent 4 squadrons, les deux autres étant le 27th et le 147th à partir du 2 juin 1918.
Les deux premières victoires aériennes américaines furent obtenues le 14 avril 1918, dès la deuxième patrouille. Les Lieutenants Alan Winslow et Douglas Campbell abattirent chacun un ennemi au-dessus de leur propre aérodrome à Gengoult. Plusieurs pilotes américains célèbres commencèrent leur carrière sur cet appareil, dont l'as aux 26 victoires Eddie Rickenbacker, qui remporta certaines de ses victoires sur cet appareil au sein du 94th Aero Squadron. Le propre fils de Theodore Roosevelt, Quentin, fut abattu et tué sur cette machine.
C'est ainsi que le Nieuport 28 devint le premier avion de combat à servir dans une unité américaine sous commandement américain, à soutenir des troupes américaines au sol, et le premier à enregistrer une victoire aérienne américaine.
Le Nieuport 28 avait quelques défauts de conception : un train d'atterrissage trop fragile (ce qui fut corrigé), et un moteur peu fiable et ayant tendance à prendre feu. Des modifications furent apportés sur les terrains mêmes, et la solution la plus simple consistait à ne pas remplir complètement le réservoir. L'entoilage de l'aile supérieure elle-même était fragile et pouvait se détacher lors d'un piqué. Malgré ses défauts, les Américains apprécièrent sa maniabilité (supérieure à celle du Spad XIII) et ses performances.
Dès juillet 1918, le Nieuport 28 fut remplacé par le Spad XIII au sein des 94th et 95th Aero Squadron, puis en août pour les 27th et 147th. Curieusement, si les pilotes des deux premiers squadrons apprécièrent le changement, il n'en est pas de même pour les deux derniers.
Il semble que les États-Unis s'intéressèrent à une version améliorée, le Nieuport 28A-1. Cette version était équipée de mitrailleuses américaines Marlin de calibre 0.30, les ailes et le système d'alimentation en carburant améliorés. 600 exemplaires furent commandés à Lioré et Olivier, mais seuls 170 exemplaires furent livrés avant la fin de la guerre, plus des pièces détachées pour 100 autres exemplaires.
12 exemplaires furent transférés à l'US Navy qui les dota d'équipements provenant de la Royal Navy (notamment des flotteurs d'ailes) et les déploya sur des navires de guerre, comme l'USS Arizona, à titre d'expérimentation. Ils décollaient à partir d'une rampe de lancement.
Après la guerre, une cinquantaine de Nieuport 28 (peut-être des machines neuves) furent convoyées aux États-Unis où elles eurent une carrière civile, en particulier dans le cinéma. Ils apparurent notamment dans "La Patrouille de l'aube" de 1930. Des répliques comme le Garland-Lincoln LF-1 (3 exemplaires) furent même construites spécifiquement pour représenter des avions de combat de la Première guerre mondiale dans des films hollywoodiens. D'autres répliques ont été construites plus récemment pour les amateurs de warbirds.
Le Nieuport 28 se vendit également à l'exportation après-guerre : la Suisse obtint 15 exemplaires à partir de 1919, qui servirent jusqu'en 1930. Le premier d'entre eux aurait en réalité été interné pendant la guerre, suite à l'atterrissage forcé d'un pilote américain. L'Argentine et le Guatemala reçurent respectivement 2 et 1 exemplaires. De plus, 4 Nieuport 28 furent utilisés pour le transport du courrier entre Paris et Londres en 1920.
Il semble que la France n'ait jamais utilisé le Nieuport 28 dans ses unités, ou alors en très petit nombre. Des exemplaires auraient été versés à la Grèce, au Royal Naval Air Service, à l'Italie, au Portugal et aux Russes blancs alors en lutte contre les communismes. Mais ces dernières informations ne sont absolument pas confirmées.
297 exemplaires furent construits, dont la majorité équipèrent les États-Unis. Quelques uns ont survécu. Deux sont exposés en Suisse (à Dübendorf et à Lucerne) et deux autres au Steven F. Udvar-Hazy Center et à Pensacola. Ce dernier n'est cependant qu'une réplique.
Anciens pays utilisateurs
Versions
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Nieuport 28A1
: Version améliorée avec des mitrailleuses américaines Marlin. N'a peut-être pas été produite.
- Nieuport 28C1
: Version basique de chasse.
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Nieuport LF-1
: Réplique du Nieuport 28 construite pour des films par Garland-Lincoln. Au moins 3 exemplaires.