Historique
A compter de 1952, la firme Potez renait de ses cendres à Argenteuil, et propose alors un nouveau prototype : le Potez 75.
Ce dernier a sans doute la particularité d'être un des premiers avions de combat spécialement dédié à la lutte anti-chars. En effet, il a été spécifiquement conçu pour emporter des missiles Nord SS-10 et pour être utilisé en Europe. La configuration générale du Potez 75 fut d'ailleurs réutilisée depuis sur d'autres appareils comme l'OV-10 Bronco : configuration bipoutre et bidérive, hélice propulsive…
C'est sur initiative privée d'Henry Potez et sous la direction de M. Delaruelle que le Potez 75 fut conçu, afin de servir de plate-forme au SS-10 filo-guidé. Il s'agissait d'un biplace en tandem, avec cockpits séparés : l'opérateur des missiles prenait place dans le nez, tandis que le pilote disposait d'une cabine en hauteur, d'ailleurs ouverte au départ… Ce qui n’empêchait pas les cockpits et d'autres parties de l'avion de recevoir un blindage.
Le train d'atterrissage était tricycle et fixe. L'appareil était motorisé par un unique Potez 8D.32 à 8 cylindres en V inversé, refroidi par air et fournissant 480 cv au décollage. Ce moteur actionnait une hélice Ratier placée à l'arrière, tripale et à pas variable. Ainsi, le Potez 75 pouvait opérer à partir de terrains sommaires, et disposait de capacités ADAC (il était capable de décoller en 150 m à 100 km/h).
L'appareil était monoplan cantilever, à ailes médianes et droites. Elles étaient prolongées par 2 poutres encadrant l'hélice et supportant les dérives. Celles-ci étaient reliées par un plan horizontal à leur sommet. La construction était entièrement métallique.
L'armement était constitué de 4 mitrailleuses MAC34/39 de 7,5 mm dans la partie basse du nez et de 8 roquettes sous les ailes. Ces 8 roquettes pouvaient être remplacées par 4 missiles SS-10 ou des bombes.
La construction du prototype prit 5 mois. Le Potez 75 vola pour la première fois le 10 juin 1953 entre les mains de Georges Detré, avec l'immatriculation F-ZWSA. Il reçut plus tard d'autres immatriculations, F-WGVK puis l'immatriculation militaire F-MAFY.
L'armée le testa, mais ne fut pas convaincu par l'appareil comme plate-forme de missiles. En effet, sa conception paraît ancienne (surtout avec ce cockpit ouvert) et surtout, il est sous-motorisé, ce qui limite ses performances.
Le 26 septembre 1954, avec le déclenchement de la guerre d'Algérie, l'Armée de l'Air lance un programme pour un avion multi-missions destiné à la lutte anti-guérilla, capable d'attaque au sol, de soutien aérien, de reconnaissance et d'observation, bien armé et bien protégé.
Les spécifications sont les suivantes : biplace ou triplace, bi-turbopropulseurs, moins de 5000 kg, autonomie de 2000 km en convoyage, 5 heures d'autonomie, armement lourd avec au moins 2 canons de 30 mm, des bombes et des roquettes, vitesse de croisière de 400 km/h, capacité ADAC (moins de 300 mètres) sur des terrains sommaires. Une capacité secondaire de transport et de liaison est rajoutée.
Bréguet, Dassault, Fouga, Latécoère, Morane-Saulnier, Nord Aviation, Potez, SIPA, la SNCASO et la SNCASE se lancent dans l'aventure. Les appareils proposés sont respectivement le Br.1060, le MD.410/415, le CM-220, le Laté 820, le MS.1500, le Nord 3300, le Potez 75, le S-1100, le SO.7100 Dogue et le X-116.
Pour Dassault, Morane-Saulnier et Potez, une source indique les modèles MD-315B, MS.1600 et Potez TOE. Peut-être ont-ils revus leur copie avant de revenir dans la compétition. Quand à Bréguet, Fouga, Latécoère, Nord-Aviation et la SNCASO, ils sont rejetés dans la compétition sans pouvoir construire leur projets.
Restent donc le MD.415 de Dassault, le MS.1500 de Morane, le Potez 75, le S-1100 de SIPA et le X-116 de Sud-Est.
Bien que monomoteur, le Potez 75 est tout de même proposé au cas où. Et bien qu'il soit un avion privé, un prototype appartenant à son fabricant, il est testé en conditions réelles à Biskra lors de la guerre d'Algérie.
Une fois de plus, il ne se montra pas convaincant. Outre sa sous-motorisation et son cockpit ouvert, il y avait un problème de coordination entre l'opérateur d'armes et le pilote. En mai 1956, une commande pour 15 machines de pré-série et 100 exemplaires de série fut envisagée (selon certaines sources, l’appareil aurait donné satisfaction et elle aurait été passée, puis annulée l'année 1957 à cause de contraintes budgétaires), mais non concrétisée. Il fut donc rejeté aussi bien par l'Armée de l'Air que par l'ALAT en juin 1957.
L'appareil fut exposé au salon du Bourget en 1957, puis fut utilisé comme avion personnel du général Maurice Redon (commandant de l'ALAT) jusqu'au 16 septembre 1958, date à laquelle il fut endommagé dans un accident puis ferraillé.
L'unique prototype construit connut 4 configurations différentes liées à ses cockpits. Pour les 2 premières versions, le cockpit du pilote était ouvert et le nez avant était constitué de hublots. Avec la 3e version, le cockpit du pilote fut fermé. Avec la 4e et dernière version, le nez avant devint vitré afin de donner davantage de visibilité à l'opérateur d'armement.