Dirty Wars - Le nouvel art de la guerre (Jeremy Scahill)

Voici un livre qui est grandement recommandable :

La guerre sans fin. « Dirty Wars », de Jeremy Scahill {Le Monde}

Ce que le récit de Jeremy Scahill évoque, ce qu’il permet d'envisager fait froid dans le dos. Cela s'appellerait la guerre permanente.

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Deux constats principaux émergent du livre : le premier est que, au-delà des conflits officiels en Afghanistan et en Irak, la guerre américaine est « une guerre planétaire en secret et en toute liberté » ; le second est que, au-delà de la présidence de George W. Bush, communément critiquée pour la guerre d’Irak, l’usage de la torture et les prisons secrètes, « le programme de capture et d’assassinat du gouvernement américain est en pleine expansion » depuis l’élection de Barack Obama.

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Ecrite comme un thriller, l’enquête de Jeremy Scahill est excellente parce qu’il a travaillé sur deux fronts à la fois. D’un côté, il traîne ses guêtres de reporter dans les montagnes afghanes, les villages du Yémen et les rues de Mogadiscio. De l’autre, aux Etats-Unis, il débusque des informateurs jusqu’au sein des plus obscurs services secrets, notamment le Joint Special Operations Command (JSOC), un organisme des forces spéciales inconnu du public jusqu’à l’opération de la Navy Seal Team 6 contre Oussama Ben Laden, et qui partage avec la CIA la tâche de mener les guerres secrètes.

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Chaque mardi, le président américain décide, sur la base de listes établies par le JSOC et la CIA, quels individus sur la planète seront assassinés. Pour être désigné comme « cible », nul besoin d’avoir attaqué ni menacé les Etats-Unis. Il suffit d’être « présumé terroriste », ou militant d’une organisation jugée « ennemie ».

A Washington, certains ont baptisé ces réunions les « mardis de la terreur ». La Maison Blanche « agit à la fois comme procureur, juge et jury, écrit Scahill. Le président et ses conseillers déterminent secrètement qui doit vivre ou mourir, interprètent les lois derrière des portes closes et considèrent qu’aucune cible n’est illégitime, pas même un citoyen américain ».

Un livre hyper documenté, écrit comme un roman d'espionnage-action, thriller à suspens.

Plaira à tous les passionnés de forces spéciales et d'opérations de l'ombre, j'en fais partie bien sur.

J'ai lu l'intégralité du livre (+ de 600 pages !).

Il est hyper intéressant, très documenté.

J'avoue que la lecture met assez mal à l'aise, tant l'auteur arrive à faire ressortir le côté extra-judiciaire et secret des mises à mort par usage de drones, et des dérapages dans la guerre contre le terrorisme (enlèvements, traitements assimilables à de la torture).

De plus, l'auteur dresse un bilan sans concession de la lutte antiterroriste menée par les USA.

Si l'administration de Barack Obama n'est pas épargnée, avec les bavures multiples liées à l'usage massif de drones tueurs, l'administration de GW Bush est littéralement clouée au pilori.

Il faut dire qu'un échec en succède à un autre :

Afghanistan, Irak (erreur monumentale sur laquelle l'auteur détaille largement pourquoi), Somalie en 2006 (par l'intermédiaire de l'Ethiopie appuyé par l'USAF et le JSOC, et de Seigneurs de guerre somaliens appuyés par la CIA).

On s'aperçoit qu'en réalité, ces opérations multiples ne font que créer rancunes, frustrations et haines parmi les populations, générant un appel d'air géant pour Al-Qaïda et consorts, qui peuvent recruter des candidats au Jihad sans difficulté aucune.

L'auteur épingle la culture du secret qui entoure le gouvernement US et certains membres du Congrès triés sur le volet, qui décident de tout sans en référer au peuple américain.

L'auteur parle de guerre sans fin, et constate que l'administration de Barack Obama s'est approprié la vision du monde de la précédente guidée par les néoconservateurs, pour lesquels le monde est un immense champ de bataille (cf. Donald Rumsfeld, Secrétaire à la Défense de janvier 2001 à décembre 2006).

Un bilan effarant.

Merci pour le résumé ça à l'air très intéressant.

En effet, j'hésite à me l'acheter, du coup (il faut dire que j'hésitais déjà quand je l'ai vu sortir).

C'est là qu'on peut voir que même si techniquement les Américains sont bons (personne ne peut le nier, je pense), leur politique est mauvaise (en terme de qualité, je ne parle pas de morale ici). Du coup, ils ont l'impression de remporter des victoires, mais ça ne reste que des succès militaires locaux alors que d'un point de vue stratégique ils enchaînent les revers.

Trident a écrit

Merci pour le résumé ça à l'air très intéressant.

Franchement, il est difficile de s'arrêter à lire lorsque l'on commence cet ouvrage.

d9pouces a écrit

En effet, j'hésite à me l'acheter, du coup (il faut dire que j'hésitais déjà quand je l'ai vu sortir).

C'est un sacré pavé.

d9pouces a écrit

C'est là qu'on peut voir que même si techniquement les Américains sont bons (personne ne peut le nier, je pense), leur politique est mauvaise (en terme de qualité, je ne parle pas de morale ici). Du coup, ils ont l'impression de remporter des victoires, mais ça ne reste que des succès militaires locaux alors que d'un point de vue stratégique ils enchaînent les revers.

C'est pire que cela : les effets des politiques d'aujourd'hui seront sans nul doute présents dans des décennies encore.

Pour le coup, une bonne partie monde ne sera plus qu'un immense champ de bataille (c'est déjà le cas actuellement), ce qui devrait réjouir les faucons en chef que sont Richard B. Cheney (Vice-Président US de janvier 2001 à janvier 2009, le plus puissant de toute l'histoire des USA), et Donald Rumsfeld (précité).

Leur vision du monde est devenue peu à peu réalité en l'espace de 40 ans… mais cette situation est la conséquence directe des interventions tordues des USA un peu partout dans le monde.

L'ouvrage aborde également les fâcheux épisodes des interventions US en Amérique du Sud dans les années 1970 et 1980.

Ce qui est frappant, c'est de constater la très nette régression des libertés aux USA, et surtout l'accroissement inouï des pouvoirs du gouvernement US.

Ce dernier peut à présent décider de faire tuer un terroriste allégué, sans procès, y compris s'il s'agit d'un citoyen US !

Et l'administration Obama n'a fait que poursuivre la politique commencée par celle de GW Bush.

Aux yeux de l'opinion publique US, ces attaques de drones ont l'avantage de ne pas risquer la vie de soldats US au sol.

L'opinion publique US y est donc favorable, et le débat soulevé par l'élimination d'Anwar al-Awlaki* a été soigneusement étouffé.

* prédicateur islamiste d'origine américaine, citoyen américain né aux USA, éliminé en septembre 2011 par un drone US au Yémen.