Il aurait pu être le Sunderland français.
1 / Développement
Le projet du Breguet 730 naquit du programme de 1935 de la Marine Nationale pour remplacer les hydravions Breguet Bizerte d'exploration. Quatre constructeurs répondirent, Breguet (Br.730), CAMS (Potez-CAMS 141), Latécoère (Laté 611), et Lioret et Olivier (LeO H440). Tous étaient des hydravions à coque, quadrimoteur à aile haute. Après examen des 4 projets, la Marine décida de commander des prototypes à Breguet et à CAMS.
L'hydravion de Breguet innovait au niveau de la coque. Le classique fond à deux redans droits était remplacé par un unique redan en V et un éperon arrière. Cette formule permettait d'améliorer sensiblement la finesse hydrodynamique de la coque, abaissant notamment la vitesse de déjaugeage.
Le Br.730 fut assemblé fin 1937 dans l'usine du Havre, et mis à l'eau début 1938, Il fit son premier vol le 4 avril 1938, motorisé par 4 Gnome-Rhone 14N. Cependant, il fut accidenté en juillet 1938, lors d'un amerrissage par houle très formée. Il fut ramené au hangar pour de lourdes réparations sur sa coque. C'est là qu'il fut surpris par la capitulation française de juin 1940, sans avoir revolé.
Mais cet accident n'avait pas découragé la Marine Nationale qui, en janvier 1939, avait commandé 11 exemplaires de série, aussi équipé de 14N. A fin juin 1940, quatre cellules étaient déjà bien avancées.
En avril 1941, le gouvernement de Vichy obtint des puissances occupantes, l'autorisation de relancer certaines productions militaires, mais, en contrepartie les usines française devraient travailler pour le Reich et l'Italie. L'hydravion de Breguet fut parmi les programmes autorisés, avec une commande totale de 14 appareils, en deux tranches de 6 et 8 avions. En attendant les premières livraisons, il fut décidé de prélever la voilure du prototype et de l'ajuster sur la coque du premier exemplaire de série, qui était stocké depuis 1940. Cet exemplaire n° 1 fut capturé lors de l'invasion de la zone libre en novembre 1942, et remisé dans un hangar à Berre, sans réellement intéresser les Allemands. Pendant ce temps, la construction des autres cellules continuait dans la région toulousaine. Lors du bombardement du 6 avril 1944, huit des 11 machines en cours de construction furent détruits. A la libération, les 3 coques survivantes purent être remises en état, permettant d'achever un nouveau Br.730 et 2 Br.731 de transport.
Quand à l'exemplaire n° 1, il échappa à la destruction, et put rapidement être remis en état, et dès novembre 1944, recommencer ses vols d'essais. Il effectua ses vols de réception officielle en décembre, pour être remis à l'Aéronavale en février 1945, presque 7 ans après son premier vol !
Le second Br.730 fut achevé à Biscarosse, effectuant son premier vol le 14 juin 1946.
Les deux autres cellules furent achevée en Br.731, avec un nouveau nez, et aménagés en transports purs. Ils étaient motorisés par de G-R 14R plus puissants, mais tout aussi délicat que leurs prédécesseurs. Ils firent leur premier vol en septembre 1947, et mars 1949.
Aucun autre exemplaire ne fut assemblé, la formule de l'hydravion d'exploration laissant la place aux avions "à roulettes", plus souples d'emplois, et moins pénalisés par les exigences aquatiques.
2 / Description
Hydravion lourd à coque, d'exploration et de transport. Monoplan quadrimoteur à aile haute, de construction entièrement métallique, et empennage bidérive. Flotteurs latéraux fixes, contreventés, installés juste à l'extérieur des moteurs externes.
La coque se caractérisait par un unique redan en V, suivi d'un éperon qui portait à son extrémité postérieure le gouvernail marin.
Si les Br.730 et Br.731 partageaient une même ligne générale, ils étaient cependant différents sur de nombreux point, notamment au niveau du cockpit. Alors que le 730 avait une imposante galerie vitrée, très française (voir les Bizerte ou les Laté 300 militaires), afin d'offrir une bon balcon d'observation, les 731 revenait à un nez rond, largement vitré, facilitant le pilotage.
Bien qu'il vola désarmé, le 730 avait été conçu avec un puissant armement, incorporant un canon de 20 mm en tourelle, 5 mitrailleuses légères et deux tonnes de bombes ou torpilles. Le 731, quand à lui fut directement construit pour le transport.
Si les 730 étaient motorisés par des Gnome-Rhone 14N44/45 de 1150 ch, les 731 recevaient des 14R200/201 de 1350 ch. Les deux types de moteurs entrainaient des hélice tripales Ratier, à vitesse constante. Cette puissance majeure et le renforcement de la cellule permirent d'augmenter la masse maximale du 731 de 6500kg.
3 / Caractéristiques
(les dimensions des deux appareils sont identiques)
Dimensions :
- Envergure : 40,36 m
- Longueur : 24,37 m
- Hauteur : 8,60 m
- Surface Alaire : 171,86 m²
- Masse à vide : 16100 kg (730) / 17056 kg (731)
- Masse maximale au décollage : 28500 kg (730) / 35000 kg (731)
Performances
- Vitesse maximale : 330 km/h (730) / 375 km/h (731) à 1500m
- Vitesse de croisière : 230 km/h (730) / 250 km/h (731)
- Autonomie pratique: 2500 km , avec charge de 4400 kg (730) / avec 9000 kg (731)
- Autonomie maximale : 6900 km (théorique)
4 / Utilisateur
L'Aéronavale fut le seul utilisateur des 4 machines, qui servirent en transport au seins de la 9F (9ème flottille de transport) basée à Saint-Mandrier. Ils y portèrent les noms de baptème de Véga et Sirius, pour les 730 et Bellatrix et Altair, pour les 731. La Marine suivait en cela une longue tradition de baptiser ses grand hydravions, tout comme des navires. Par la suite ils furent affectés à la 33S (33ème escadrille de servitude). Ils effectuent de nombreuses rotations entre Toulon et l'Afrique du Nord, poussant jusqu'à Dakar. Véga fut perdu sur accident avec tous son équipage et les passagers en décembre 1948, au large d'Arzew (Algérie). Sirius fut radié suite à un accident (sans victime) à Port-Lyautey (aujourd'hui Kenitra, au Maroc), en juin 1951, et les deux 731 furent radiés en janvier 1954.
Un destin sans gloire pour de beaux hydravions qui auraient pu être les Sunderlands français, si la guerre ne leur avait coupé les ailes. Mais entré en service après la guerre, ils n'avaient plus d'intéret.
5 / Sources
- Jean CUNY, Pierre LEYVASTRE : « Les avions Breguet (1940/1971) », Docavia n°6, Editions Larivière, Paris, 1975
- https://www.avionslegendaires.net/avion-militaire/breguet-br-730-br-731/
- https://en.wikipedia.org/wiki/Br%C3%A9guet_730
- https://www.aviafrance.com/breguet-br-730-aviation-france-789.htm