NASA M2-F1

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  • Projet d’avion expérimental américain des années 1960, destiné à étudier les capacités de vol des aéronefs à fuselage portant (Lifting Body).

    Vers la fin des années 1950, les Etats-Unis et l’Union Soviétique se livrent une "course à l’Espace". Alors que les soviétiques envoient leurs premiers satellites, les américains piétinent avec leur programme Vanguard et se tournent déjà vers leur programme Apollo. Dans l’ombre de cet énorme programme spatial et nettement moins médiatisé, le NACA (National Advisory Committee for Aeronautics) étudie la conception d'un aéronef capable d’effectuer un vol spatial puis se poser sur terre de manière classique, ce qui éviterait les coûts élevés de récupération en plein océan. Une des principales difficultés consiste à trouver un compromis dans sa configuration, la rentrée dans l’atmosphère et le vol atmosphérique requérant des spécificités difficilement compatibles. En 1957, le Dr. A.J. Eggers Jr., directeur assistant en R&D au NACA (National Advisory Committee for Aeronautics), propose d’utiliser des aéronefs dont le fuselage seul assurerait la portance nécessaire pour se poser : les "Lifting Body" ("corps portant" en français).

    En 1958, l’agence gouvernementale américaine NASA (National Aeronautics and Space Administration), créée pour administrer et réaliser les projets d’astronautique civile, reprend le programme des Lifting Bodies. L’ingénieur R. Dale Reed, directeur de ce programme, construit une maquette en balsa et d’une longueur de 80 cm pour vérifier les calculs effectués. Elle a une forme de demi-cône avec un nez arrondi, une face supérieure plate et trois roulettes montées sur des fils de fer. Tractée par un avion radiocommandé, elle vole plutôt bien, ce qui prouve que cette configuration est possible. Dès février 1962, Reed passe à l'étape suivante du projet : la construction d'un prototype taille réelle. Afin de récolter des fonds, il présente des vidéos en 8 mm réalisées par son épouse durant les essais de la maquette, alors que d’autres ingénieurs, techniciens et pilotes d'essai de ce programme se démènent pour trouver l’argent nécessaire.

    Dès qu’environ 30'000 dollars sont réunis, le prototype est construit en seulement quatre mois. Il est ensuite testé dans le tunnel aérodynamique du centre Ames, puis prêté à l'équipe de développement pour effectuer différents tests avant de commencer les premiers vols. Désigné M2-F1 ("M" pour Manned/piloté et "F" pour Flight/prévu pour le vol), l'engin possède une structure principale en tubes d'acier, supportant les roues et le siège, réalisée dans les ateliers de la NASA. La coque extérieure est en bois contreplaqué et la verrière est en plexiglas moulé. Dépourvu d’ailes, sa forme générale lui fait ressembler à une sorte de baignoire triangulaire, ce qui explique le surnom de "Flying Bathtub" qui lui est donné. Le M2-F1 est équipé de deux dérives munies de plans horizontaux mobiles permettant le contrôle en tangage et en roulis. Le train d’atterrissage tricycle est fixe.

    Pour les premiers vols, qui doivent être effectués à quelques mètres du sol à Rogers Dry Lake, l’appareil est remorqué par une Catalina (pas un Consolidated PBY, mais une Pontiac cabriolet modifiée). En effet, le budget extrêmement limité oblige les techniciens et pilotes du projet à faire preuve d’imagination. Un ingénieur de la NASA, qui participe aux mythiques courses de Bonneville où l’on voyait s'affronter les véhicules parmi les plus rapides de la planète, avait noté que les Pontiac étaient les véhicules les plus à l'aise à hautes vitesses. Il est donc décidé d'acheter une Pontiac Catalina de 1963, un des seuls véhicules cabriolet possédant assez de couple à l’époque, grâce à son moteur 6,7 litres de 303 chevaux, pour tirer à plus de 140 km/h le M2-F1.

    Durant le premier vol, effectué le 5 avril 1963 avec le pilote d'essais Milt Thompson aux commandes, le M2-F1 atteint la vitesse de 138 km/h. Après quelques vols, le système de commandes est remplacé par un autre système doté d'amortisseurs d'amplitude, ce qui améliore le contrôle de l’appareil. Pour continuer ces essais à des vitesses plus importantes et permettre au M2-F1 de s’élever d’avantage, afin d’être largué pour planer de façon autonome, la Pontiac est envoyée chez Bill Straup, un préparateur très connu de Long Beach, en Californie. Le moteur et la boite à vitesse sont lourdement modifiés, un arceau est ajouté et le siège passager avant est tourné vers l'arrière pour permettre de mieux observer l'avion tracté. Malgré une consommation en carburant s’élevant à 1 litre au kilomètre, les modifications permettent d’atteindre les 180km/h, une vitesse qui permet à Milt Thompson de s’élever à environ 6 mètres au-dessus du sol, avant de larguer le câble de traction et planer durant une vingtaine de secondes. Au total, 48 essais en vol sont effectués avec la Pontiac, ponctués par de nombreux essais en soufflerie avec Milt Thompson aux commandes pour vérifier les améliorations aérodynamiques effectuées par les techniciens.

    Pour étendre le domaine des vols, l’équipe de développement décide d’utiliser désormais un vieux R4D de la base d'Edwards pour tracter l’appareil. Cette version du C-47 Skytrain, assez peu coûteux à l’utilisation, a également l'avantage d’être équipé d'une bulle d'observation sur la partie supérieure du fuselage, qui permettra d’observer le comportement du M2-F1 pendant les phases de vol tracté.

    De son côté, le chef des essais en vol Paul Bikle exige qu’un siège éjectable soit installé dans le prototype pour assurer la sécurité de ses pilotes d’essais, ce qui rajoute 120 kg à la masse à vide du M2-F1. Les vols devant se faire en grande partie à basse altitude et faible vitesse, et les sièges de type "zéro-zéro" n’existant pas encore, une cartouche propulsive supplémentaire est ajoutée à un siège de Dragonfly. Les premiers essais de ce siège modifié sont loin d'être concluants et aucun pilote n’est vraiment enthousiaste à l’idée de l’utiliser, après avoir vu comment le mannequin installé dessus a été disloqué lors des tests.

    Autre modification majeure : l’ajout d'un moteur-fusée à propergol solide à l'arrière. D'une poussée de 1,1 kN (112 kgp), il doit permettre d'allonger l'arrondi effectué à l'atterrissage si le taux de descente est trop élevé.

    C’est le 16 août 1963 à Edwards que le C-47 s'envole pour la première fois en tractant, à l’aide d’un câble de 300 mètres de long, le M2-F1. Largué à une altitude de 12’000 pieds (3’700 m), l’appareil chute assez rapidement, mais Milt Thompson peut le contrôler et lui fait faire un arrondi parfait à l'atterrissage, sans même utiliser le moteur-fusée additionnel. Ce premier vol au-dessus de Rodgers Dry Lake aura à peine duré deux minutes. La première série d’essais, tous avec Thomson aux commandes, se déroule un peu comme le premier vol : des "planés" d’environ deux minutes avec des vitesses entre 180 et 190 km/h et un taux de descente d’environ 1’100 m/min. À 300 mètres du sol le nez de l'appareil est abaissé pour augmenter la vitesse jusqu'à 240 km/h, puis à 60 mètres du sol le pilote entame une manœuvre d'arrondi pour se poser, en utilisant le moteur-fusée si besoin.

    Si le pilote de la NASA Milton Orville Thompson est aux commandes de la grande majorité des vols effectués par le M2-F1, d'autres pilotes, dont Chuck Yeager et Bruce Peterson, ont également volé avec cet appareil.

    Quelques petits accidents ont aussi eu lieu, heureusement sans blessé. Le 3 décembre 1963, alors que Peterson se pose, les roues du train principal se détachent du reste de l'avion suite à un atterrissage un peu brutal. Elles sont remplacées par des roues de Cessna 180 et les essais reprennent après quelques semaines de réparation.
    Le 16 juillet 1965, le M2-F1 se retourne peu après le décollage lorsque le pilote, Jerry Gentry, essaie de l'aligner avec le C-47. Après concertation avec J.Gentry, l’équipe du C-47 le largue dans cette position. Le M2-F1 fait tout son vol sur le dos jusqu'au dernier moment, lorsque Gentry, profitant de la vitesse prise, effectue un rapide tonneau et plaque l'avion sur le sol. Malgré un train d'atterrissage cassé en raison de la violence du choc, le pilote est sauf et la cellule est préservée, ce qui permet de continuer les essais.
    Le même scénario se reproduisit le 16 août 1966, une fois encore avec J. Gentry aux commandes. Mais cette fois, il parvient à rétablir son appareil alors qu’il est encore tracté.

    En excluant les salaires des employés gouvernementaux assignés au projet, la fabrication et les essais en vol du M2-F1 ont coûtés environ 50’000 dollars, soit le prix d'un Cessna Skyhawk à l'époque, ce qui en fait le projet le moins cher de l'histoire de la recherche aéronautique américaine. Il a totalisé 400 essais tractés et 77 vols entre le 5 avril 1963 et le 16 août 1966. Les résultats obtenus ont démontré que la configuration "lifting body" peut permettre aux véhicules spatiaux de se poser de manière conventionnelle. Cela débloque des budgets pour travailler avec d’autres appareils "lourds" de ce genre : les M2-F2, M2-F3 et HL-10, conçus par la NASA et construits par Northrop, ainsi que le Martin Marietta X-24 de l'USAF. Ils influenceront de façon significative le programme donnant naissance à la navette spatiale américaine.

    Le seul exemplaire construit, numéroté "N86652", est actuellement exposé à l’Air Force Flight Test Museum sur la base aérienne d'Edwards, en Californie.


    Versions :
    M2-F1 : Exemplaire unique numéroté "N86652".


    Utilisateurs militaires :
    USA : USAF et NASA entre 1963 et 1966.


    Caractéristiques et performances :
    Equipage : 1
    Longueur : 6,1 m
    Envergure : 4,32 m
    Hauteur : 2,90 m
    Surface alaire : 12,9 m2
    Masse à vide : 454 kg
    Masse maximale au décollage : 536 kg
    Vitesse tracté: 180 km/h
    Vitesse max à ne pas dépasser : 240 km/h
    Taux de descente : 18 m/s
    Armement : Sans.


    Liens internet :
    https://en.wikipedia.org/wiki/NASA_M2-F1

    https://www.nasa.gov/centers/armstrong/history/where_are_they_now/M2-F1.html

    https://www.nasa.gov/centers/armstrong/history/experimental_aircraft/M2-F1.html

    https://www.youtube.com/watch?v=DCF2AGXXjsM
    " J’ignore la nature des armes que l’on utilisera pour la troisième guerre mondiale. Mais pour la quatrième, on se battra à coup de pierres."  A. Einstein       "Pire que le bruit des bottes, le silence des pantoufles."  Max Frisch
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  • La fiche sur le site.

    Avec quelques photos sympas.
    " J’ignore la nature des armes que l’on utilisera pour la troisième guerre mondiale. Mais pour la quatrième, on se battra à coup de pierres."  A. Einstein       "Pire que le bruit des bottes, le silence des pantoufles."  Max Frisch
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