Historique
Au début des années 1950, la Chine continentale et l'Union Soviétique entretenaient des relations bilatérales très courtoises, malgré des différends idéologiques croissants. Les Soviétiques contribuaient largement à l'équipement des forces armées chinoises, et au développement de l'industrie aéronautique chinoise. Dans cette optique, plusieurs licences de production furent accordées à Pékin, licences dont la Chine devait faire un très grand usage.
En septembre 1957, un accord donna à la Chine la possibilité de produire ce qui était alors un des bombardiers stratégiques les plus modernes de son temps, le Tupolev Tu-16 Badger. Le Tu-16 avait partiellement déçu les espoirs des Soviétiques, mais ceux-ci choisirent d'en maintenir la production en série. Les Chinois comprirent vite l'intérêt qu'ils avaient de disposer de bombardiers stratégiques, notamment pour démontrer leur puissance à leurs voisins, notamment à l'Inde. Mais produire le Tu-16 était un défi sérieux pour la jeune industrie chinoise.
Les Chinois décidèrent que leur nouvel appareil, un temps baptisé Feilong-201 (en chinois, dragon volant) puis H-6 (
hongzhaji-6, littéralement bombardier 6), devrait être produit dans deux usines, l'une à Harbin en Mandchourie, l'autre plus au sud, à Xian. C'est ce dernier site qui devait finalement être chargé de produire les H-6, d'où la dénomination de l'appareil : Xian H-6. Bien qu'ils aient obtenus les plans du Tu-16, les ingénieurs chinois durent d'abord recourir à des Tu-16 livrés en kits, et montés dans les usines chinoises.
Les premiers appareils ainsi produits effectuèrent leurs premiers vols à la fin de l'année 1959. Mais la rupture avec l'Union Soviétique entraîna la fin des livraisons et l'arrêt du support technique soviétique, ce qui ralentit le programme, au même titre que les désordres internes à la Chine comme la Révolution Culturelle de 1966. Toutefois, l'industrie chinoise surmonta cet obstacle, et les premiers H-6 produits totalement en Chine devaient être déclarés opérationnels en 1968, après qu'un premier exemplaire, achevé en octobre 1966, ait servi à des tests statiques. Les premiers H-6 véritablement "chinois" entrèrent en service dans la PLAAF en 1969.
Extérieurement parlant, le H-6 est un Tupolev Tu-16 Badger. Il possède également les mêmes moteurs, le même armement défensif et la plupart de ses systèmes. Ce n'est que progressivement que le H-6 reçut des équipements développés localement. Et tout comme le Tu-16 soviétique, son éventail de mission s'accrut également avec le temps. D'abord destiné à des missions de bombardement classique, le H-6 reçut également la lourde charge de porter la bombe atomique chinoise, puis des missions d'attaque plus précises ou des tâches plus originales, comme le largage de drones ou le ravitaillement en vol. L'arrivée des missiles de croisière dans l'arsenal chinois contribua aussi à donner un second souffle au H-6.
Tout comme le Tu-16, le H-6 a connu de très nombreuses versions de production. Les sources ne sont pas toutes unanimes sur le sujet. Il y a notamment des divergences au sujet des H-6A et H-6C. Nous nous en tiendrons aux désignations utilisées par Yefim Gordon.
Versions principales :-
H-6 : la première version produite ; il s'agit avant tout d'un Tu-16 produit sous licence.
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H-6A : pour certaines sources (Sinodefence.net), le H-6A est un H-6 amélioré ; pour Yefim Gordon, le H-6A est la première version spécifiquement dédiée au bombardement nucléaire.
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H-6B : version dédiée à des missions de reconnaissance, équipée de caméras optiques et d'une caméra infrarouge.
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H-6C : version nettement améliorée, dans les années 1970 ; il semble que les améliorations décrites par Yefim Gordon dans son ouvrage correspondent au standard H-6AIII de Sinodefence (pour ce site, le H-6C est avant tout un H-6A équipé d'un système complet d'autoprotection).
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H-6D : version développée à partir de 1975 pour la PLANAF, et destinée à la lutte anti-navires ; premier vol le 29 août 1981, entrée en service en décembre 1985 ; équipé notamment d'un radar de surveillance Type 245 ( portée de 150 m à 9 000 m d'altitude ), et de 2 missiles air-surface YJ-6L ( désignation OTAN : CAS-1 Kraken ; copie du SS-N-2 Styx soviétique ; portée : 120 km ) sous les ailes.
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H-6H : plate-forme dédiée aux frappes air-sol ; emporte 2 missiles de croisière KD-83 sous pylônes, ni baie interne ni armement défensif ; version développée après l'échec d'un achat du Tupolev Tu-22M3 à la Russie.
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H-6M : peut-être une solution intermédiaire, en attendant le H-6K plus moderne ; meilleure électronique, emport possible de missiles de croisière CJ-10K et de pods de contre-mesures, pas de canons de 23 mm.
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H-6K (connu aussi comme
BC-1) : version la plus avancée, en matière d'équipement et d'armement ( jusqu'à 6 CJ-10K ou 20 bombes guidées de 500 kg ) ; deux moteurs D-30KP russes (les mêmes que ceux de l'Iliouchine Il-76MD) ; doté d'écrans multifonctions et de sièges éjectables. Sa caractéristique la plus évidente est un nez plein remplaçant l'ancien nez vitré. Entré en service en 2013, il équipe 2 régiments en 2015.
On peut distinguer aussi quatre versions particulières :
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HD-6 : version destinée à des missions de guerre électronique ; désigné comme
hongzhaji dian, littéralement bombardier-appareil de guerre électronique ; se distingue notamment par son nez plein et non vitré.
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HU-6 (ou
HY-6) : version destinée au ravitaillement en vol ; désigné comme
hongzhaji you, bombardier-ravitailleur ; version développée dans les années 1980, pour donner une allonge accrue aux appareils chinois ; transporte 37 tonnes de carburant et les délivre au moyen d'un système
probe-and-drogue, via deux tuyaux situés sous les ailes
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H-6 modifié : un exemplaire connu, entré en service en 1971 ; exemplaire utilisé pour le lancement de 1 ou 2 drones Ba-6.
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H-6I (ou parfois H8) qui est un H6 équipé de quatre réacteurs Rolls-Royce Spey Mk512-5W. Le développement commença dans les années 1970 et le premier vol eu lieu en 1978.
Les H-6 sont toujours en service, et leur mise à la retraite semble exclue à moyen terme. Ils n'ont pas vraiment été exportés : l'Egypte aurait mis en œuvre quelques appareils après la guerre de Kippour. L'Irak a reçu 4 appareils de type H-6D durant la guerre contre l'Iran (1980-1988), avec des missiles C-601. Ils furent tous détruits au sol durant la guerre du Golfe (1991).
A l'heure actuelle, la Chine disposerait de l'essentiel des appareils produits, dont on estime le nombre entre 150 et 200 exemplaires.
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