[quote][b][url=/v3/forum/questions-g%C3%A9n%C3%A9rales-et-techniques-41/topic/furtivit%C3%A9-260/?post=36801#post-36801]ex-pit[/url] a dit le 13/04/2007 à 21:33 :[/b] [quote="pilou"]Alors, le Raptor a-t-il une réelle peinture "furtive" ? Si oui, que représente-t-elle dans la furtivité de l'appareil ? 10 % ? 20 % ? ... ?[/quote] Personne n'ayant daigné repondre, je me lance donc à l'eau pour apporter mes maigres connaissances et tenter de repondre a ces epineuses questions... Je ne sais pas quelles sont les connaissances des membres et il est certain que certains principes enoncés ci dessous seront trivials pour la plupart d'entre vous. Je vous pris de m'en excusez d'avance... La premiere réponse est aisée : oui il est quasiment certain que le F-22 possede un revetement "furtif". Pour la deuxieme partie de la question, à moins de connaitre quelqu'un de tres bien placé dans l'US Air Force, la reponse ne sera pas vraimment dipo... et de toute façon, je ne penses pas qu'elle ne se pose en ces termes. En preambule, je tiens juste à signaler que je ne ferais pas de layus technique à base de formules mathematiques complexes qui rendraient les choses certes plus facile pour le redacteur, mais pas vraiment pour les lecteurs. J'axerais alors mon propos sur des concepts, qui comme toujours, souffriront d'approximation. Le but est ici de comprendre le principe, non pas de fabriquer un F-22 dans son garage. Pour tenter de comprendre comment echapper à une detection radar, il faut deja comprendre grossièrement le phenomène du radar. [i]"Le radar est un système qui utilise les ondes radio pour détecter et déterminer la distance et/ou la vitesse d'objets tels que les avions, bateaux, ou encore la pluie. Un émetteur envoie des ondes radio, qui sont réfléchies par la cible et détectées par un récepteur, souvent situé au même endroit que l'émetteur. La position est estimée grâce au temps de retour du signal et la vitesse est mesurée à partir du changement de fréquence du signal par effet Doppler."[/i] (source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Radar). Je vous invite d'ailleurs à lire cette page pour plus de comprehension. La detection radar repose donc sur le fait qu'une onde envoyée par un emeteur rebondit sur un objet pour etre ensuite analysée par un recepteur (pouvant etre le radar lui meme ou placé à un tout autre endroit). Les principales caractéristiques du radar sont la puissance et la longeur d'onde utilisées, paramètres qui détermineront : - Une portée (distance limite au delà de laquelle le système est incapable de fournir des mesures fiables, le rapport signal sur bruit devenant trop important.) - Une résolution (elle s'articule sur la capacité du système à distinguer d'une part un objet et d'autre part de distinguer deux objets proches. Elle dépend principalement de la largeur des faisceaux et de la taille de la "pastille insonifiée". Plus les faisceaux sont fins, meilleure est la résolution). - Une précision (la précision du radar traduit la qualité d’estimation de la distance (précision verticale) et de la position des objets (précision horizontale) déterminées par le système. Elle dépend de la précision des mesures d’angles et de distances et de la précision des capteurs ou mesures auxiliaires : système de positionnement, centrale d’attitude, etc.) Ensuite, tout sera fonction de la réflectivité de la cible (pouvant etre exprimée en décibel). La réflectivité (ou reflectance) est la capacité que possède une surface à renvoyer une partie de l'énergie reçue. Lorsque le train d'onde frappe la surface, il y a une partie qui est reflechie (dans toutes les directions de l'espace, donc échappant à l'acquisition radar), refractée (je sauterais l'explication...), transmise (en gros l'onde travers l'objet comme dans le cas d'une vitre), retrodiffusée (c'est la portion du signal radar que la cible redirige directement vers le recepteur, c'est cette partie qui permet de "voir" l'objet sur le scop radar), et absorbée. Cette repartition sera fonction des principaux paramètres suivant : la nature de la surface de la cible (caractérisée par son impédance acoustique : produit de la vitesse du milieu par lequel passe l'onde et de sa densité), de son epaisseur, de sa rugosité, de l'angle d'incidence du train d'onde sur la surface, du taux d'humidité et des propriétés électriques et magnétiques de la cible. L'essentiel pour l'avion qui veut etre invisible est donc de minimiser la partie retrodiffusée de l'onde recue. A cela plusieurs orientations différentes (mais généralement combiner en vue d'optimiser la furtivité au sein du meme appareil) : Cas 1a : passer sous la resolution du radar. Vu les longeurs d'ondes utilisées par les radars, cela demanderait de faire des petits avions... Cas 1b : optmiser lors de la creation de l'avion la signature radar, de part ses dimensions, ses formes, etc... Un peu comme pour l'aerodynamisme. Cas 1c : transformer totalement le signal recu et en emettre un autre. C'est la contre mesure. En gros, il s'agit de brouiller complement le recepteur en le saturant ou en anhilant les (ré)emissions radars en renvoyant la meme, mais en inversant la phase. Il s'agit alors d'acquerir le train d'onde, d'inverser la phase et de le renvoyer suivant la direction de l'onde recue... Merci l'electronique. Mais ca se fait tres bien. Cas 2 : Tout faire pour mettre la retrodiffusion à 0, quitte à mettre la reflexion à 100%. On va pour cela utiliser des surfaces parfaitement lisses (une surface sera considérée "radariquement lisse" si les variations verticales de sa surface sont beaucoup plus petites que la longueur d'onde du radar. Dans le cas contraire, la surface est dite "rugueuse" et elle diffusera dans toutes les directions de l'espace, donc avec une composante "retrodiffusée", c'est à dire q'une partie repartira vers le radar). Dans le cas du radar cherchant un avion, on peut considerer que l'angle d'incidence moyen des ondes sera généralement oblique. Pourvu de telles surfaces et compte tenu des differences d'impedances, les ondes ricocheront sur l'avion, qui ne renverra aucune d'onde vers le radar : il sera parfaitement invisible. Par contre, ce sera de pietre efficacité pour des stations maillées, où les recepteurs et emetteurs cooperent sur des grandes echelles... Cependant, pour des stations autonomes, il exite cependant un cas qui fera que l'avion pourvu de telles surfaces renverra tout de meme un echo, c'est dans le cas où l'onde sera perpendiculaire à une de ces surfaces lisses. L'onde sera alors dite "spéculaire". Pour comprendre ce phenomene, le plus simple est de prendre un exemple. Une lampe en main, rendez vous dans votre salle de bain et eclairez le miroir. Lorsque la lampe eclaire le miroir, une partie infime de l'onde revient vers vous : cela vous permet de voir le faisceau de la lampe dans le miroir (car le miroir que vous possedez n'est pas "lumineusement lisse" : il existe des rugosités de taille superieur a la longueur d'onde de la lumiere. Sinon : vous ne verriez pas le faisceau lumineux !). Mais lorsque vous allez vous retrouver en face du miroir, et que le rayon sera perpendiculaire à sa surface, vous vous retrouverz ébloui : vous serez en mode "speculaire". Cette methode de mettre la retrodiffusion à 0, quitte à mettre la reflexion à 100%, est la methode de protection radar qui fut choisi pour le F-117 où les surfaces ont ete optimisée de façon à ce que les ondes radars ricochent dessus et ne renvoie rien vers le radar (cas emeteur et recepteur confondu). Et si par malheur pour l'avion, il y a interception radar, c'est dans le cas speculaire, qui conduit à une saturation sous forme "dirac" (signal d'amplitude infinie sur un durée "infiniment brève"). Pour schematiser, le F-117 est soit invisible, soit il sature la chaine d'acquisition radar de façon instantané, rendant impossible tout calcul de position, de vitesse, etc... Le radar est ebloui. Par contre, c'est assez contraignant car l'avion n'est pas vraiment invisible et à partir de deux acquisitions ponctuels - deux eclats -, il est possible d'en déduire sa vitesse et sa direction de deplacement. Cela force alors l'avion d'avoir des trajectoires non linéaires. Et si l'ennemi possede un bon maillage radar qui desolidarise les recepteurs/emeteurs... il est cuit le F-117... Mais pour les stations radars autonomes (cas de la majorité des pays tout de meme), l'operateur ne verra sur le scope qu'un point apparaissant de façon aleatoire... Un peu stressant pour la defense anti aerienne... Cas 3 : On va essayer de diminuer les ondes reflechies et retrodiffusée, en favorisant la transmission. C'est la parade parfaite. Un exemple : une vitre qui va se laisser traverser par la lumiere. Aujourd'hui tres difficile a mettre en place, mais pas impossible à mon sens dans le futur. Il s'agirait de mettre au point un materiau qui reagirait avec les ondes radars comme le verre avec la lumiere... etre transparent... Cas 4 : On va essayer de diminuer les ondes reflechies et retrodiffusée, en favorisant l'absorbtion. Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. Il faut "transformer" ces ondes recues, de façon à ce qu'elles ne repartent pas vers un recepteur. La "transformation" peut etre sous forme de chaleur, tel le mur qui chauffe en plein soleil, absorbant une partie du rayonnement, de champs magnetiques et/ou electriques induits (dont les proprietes seront fonction des caractéritiques electriques et magnetiques du support). Le SR-71 basait sa furtivité là dessus, en etant recouvert d'une peinture à base de microbille d'acier et de titane, qui "absorbait" le rayonnement radar de deux façons. D'une part en forçant les ondes radars à rebondir de façon multiple entre les grains (donc en provocant la dissipation du rayonnement radar par le chemin parcouru) et d'autre part, ce type d'enduit permet de convertir une partie des ondes radars en chaleur (par oscilations moléculaires), chaleur ensuite transférée à l'appareil et dissipée au milieu ambiant. C'est par le meme principe que l'eau chauffe dans les fours à micro-ondes (les fréquences radars sont, pour certaines, dans le domaines des micro-ondes). Ce type de revetement a été évidemment amelioré depuis et utilisé notamment sur les F-117 et B2. A mon avis, elle figure evidement sur le F-22. Mais il existe differents types de revetements, de différentes compositions (proportions variables de titane, fer et carbone et sans doute d'autres alliages "secrets"), de différentes densités et de différentes epaisseurs. Ces différents parametres [b]varient et sont fonction des longueurs d'ondes que l'on cherche à absorber[/b]. Le revetement sera physiquement centré sur une longueur d'onde bien particulière qui sera clairement definie et qui ne pourra que difficilement changée (comme une antenne radio). Apres, plus on s'ecartera de cette frequence, moins l'absorption sera parfaite. Là, la strategie intervient. Il convient de definir [u]le[/u] pic de la gamme que l'on veut absorber. Si mes souvenirs sont bons, les revetements F-117 et SR-71 etaient optimisés pour des gammes de l'ordre de 300MHz... Et pour le F-22, quel choix ?! Reflechisez y, car on en reparlera plus tard. Mais il y a un hic a ces methodes... car il faut que la peinture et la structure de surface soient coherentes avec le support. Cela peut apparaitre trivial, mais, et c'est au combien important : il faut que le revetement choisi tienne, que le poids soit moderé, que cela ne pertube pas l'avion dans ses com' (eviter la cage de faraday), que cela soit stable avec les elevations de temperature due à la vitesse, que cela supporte l'humidité, les rayons du soleil, qu'il n'y ai pas d'effet electromagnetique ou d'electricité statique du au frottement de l'air... Et là, c'est pas facile. Merci la R&D et ensuite merci la maintenance de ces revetements qui coute à elle seule une fortune !! Cas 5 : Autre parametre, notamment retenu dans le cadre du B2 : la mise en place d'un écran dit de "Salisbury" sous la peinture. Cette structure permet de renvoyer une onde de même amplitude et fréquence, mais en opposition de phase avec la première. C'est un [u]systeme passif [/u]donc inchangeable en cours de mission et qui, comme dans le cas de la peinture, n'est valable que pour une longueur d'onde... Les avions furtifs possedent generalement des decoupes assez curieuses en dents de scie sur les bords des strucutres. Les formes de ces decoupes ne sont pas faites au hasard : elles sont directement fonction des longueurs d'ondes des radars à eviter. Là encore, c'est le principe de "Salisbury" qui permet de diminuer les echos radars des différentes extremités de l'avion par inversion des phases. Les cas 4 et 5 sont les plus elaborés car ils permettent non seulement d'eviter les radars autonomes mais contrecarrent egalement les systemes maillés. Alors maintenant, la question de Pilou... La peinture 10, 20% de la furtivité ? Comme on a vu, ça va dependre : de l'angle d'incidence, de la rugosité de la dite peinture mais surtout de la longueur d'onde du radar que l'on cherche à eviter... Mais il est clair que l'apport d'un revetement adapté va diminuer fortement la SER (Section Equivalente Radar). Pour quantifier la reflectivité d'un objet tridimensionel complexe comme l'est un avion avec ses formes alambiqués, on le rapporte à un volume isotrope spherique. On s'affranchit alors des angles d'incidence pour la modelisation. Les avions furtifs combinent les différentes techniques évoquées (qui ne font pas forcement bon menage avec l'aerodynamisme et les efforts des cellules, d'où des formes "futuristes", type F-117 ou B2). Mais bonnant malant, la SER de ces avions dit "furtifs" est officiellent ramenée à une balle de tennis. Mais quelle est la part de la peinture, pour avoir une telle signature, entre la forme, les materiaux, les brouillages actifs ou passifs ? C'est tres difficile a determiner dans la furtivité globale. Mais il faut à mon avis raisonner de façon globale (on s'ecarte de la science pour laisser place à mon regard personnel) : si j'etais concepteur de F-22, je choisirais des caractéristiques de forme/structure, d'écran de "Salisbury", de brouillages actifs et de peinture [u]specifiquement définies chacunes pour différentes longueurs d'ondes[/u]. Je repondrais alors ainsi à la question concernant la part de furtivité à attribuer a la peinture : 90% pour telle longueur d'onde (par exemple radar de tir d'avion ennemis, particulirement de dos), 70% pour telles autres (par exemple radars autodirecteurs des missiles) et 15% pour telles autres (surveillance de traffic aérien)... La protection radar contre la surveillance de traffic aerien serait quant à elle plus axée sur la forme d'ensemble et materiaux de base... Ces chiffres sont evidement sans fondement et sont donnés à titre d'illustration du probleme. Le corrolaire à cette peinture explique egalement pourquoi les revetements sont aussi sensibles. D'une part bien sur pour eviter de les copier, mais egalement pour eviter de dire à quel domaine de frequence on souhaite que le revetement de surface soit furtif... Mais je reviens a ma question posée plus haut : pour votre part, quelle menace l'action de la peinture doit elle contrecarrer en premier ordre ?! Quelle gamme de frequence vous semble la plus importante à eviter dans le cas du F-22 ?! Radar sol ? Avion ? Missile ? Feriez vous les memes choix que pour les F-117 et SR-71 avec l'accent mis sur les radars à très longue portée ? Avec les menaces d'aujourd'hui ne vaut il pas mieux de se proteger contre les futures Meteor des Rafales ? Nouveau sujet de debat qui aurait sa place sur le forum, n'est ce pas !! On reste theorique en mettant de coté les contraintes techniques. Car une couche de peinture de 20cm n'est pas tres concevable... En esperant ne pas avoir été trop rebarbatif... et en esperant avoir apporter des elements de reponse à la question... [size=75]P. qui attend maintenant que Pilou corrige les fautes...[/size][/quote]