[quote][b][url=/v3/forum/autres-sujets-militaires-44/topic/les-anecdotes-de-lhistoire-a%C3%A9ronautique-650/?post=19621#post-19621]pcmax[/url] a dit le 23/01/2008 à 11:15 :[/b] [u]Quand la passion devient folie[/u] ! Chose promise, chose due… lors de mon dernier post, je vous ai annoncé que j'avais été engagé, en tant que Gendarme, sur une affaire unique en France lors de mon affectation à DOMME, en Périgord, dans les années 1980 : Le premier détournement d'un avion d'aéroclub ! La voilà ! [size=85](Pour des besoins de confidentialité – et par pur oubli de ma part :lol: – les prénoms des personnages sont fictifs) [/size] Paul était un garçon apparemment équilibré, de bonne famille, résidant de la région de Bergerac (24) et avant tout passionné d'aéronautique. Il avait assidûment suivi des cours de Pilote Privé d'Avions à l'aéroclub local mais un accident de moto, qui lui avait voulu la perte d'un œil, avait subitement mit fin à son rêve. Pris d'affection par ses ex moniteurs, il parvenait cependant, de temps à autre, à se faire embarquer pour un vol où durant quelques minutes et à sa plus grande joie le manche lui était confié. Ce jour là, il se présentait au "bar de l'escadrille" et Sophie, son ex monitrice qui s'apprétait à prendre l'air pour un vol local ne put, une fois de plus, lui refuser une balade. Le Cessna 172 (il me semble) prit l'air. Paul en était passager et Sophie ne se doutait pas encore qu'elle allait être l'objet d'un fait divers unique. A l'altitude de croisière, Paul ne demanda le manche comme d'habitude mais sorti de la poche de sa veste un revolver noir et brillant avec lequel il mit en joue son pilote en lui demandant de prendre la direction de .. La Suisse ! Sophie ne fût pas inquiète de le voir agir ainsi, pensant à une mauvaise blague. Ce ne fût que lorsque son arcade sourcilière saigna sous le coup de crosse qu'elle comprit que quelque chose se déroulait mal et que son passager venait de "péter les plombs". Chaque tentative de ramener à la raison son pirate de l'air se soldant d'un coup supplémentaire, Sophie s'engagea alors dans la médiation. Paul fût assez naïf pour la croire et lui accorda le déroutement vers l'aérodrome de DOMME où elle prétextait la récupération de cartes aéronautiques nationales, nécessaires au trajet vers les cimes helvétiques. Le Cessna se posa sur la longue bande bitumée et, sur les injonctions de Paul, le pilote remis l'avion en position de départ en bout de piste. Questionnée par la tour sur ses intentions, Sophie ne savait que dire et mit son agresseur au pied du mur… S'il voulait fuir Dieu seul sait quoi, il aurait besoin de la complicité de sa victime ! Aussi invraisemblable que cela puisse paraître, Paul lui donna l'autorisation de quitter l'avion et de se rendre à la tour y chercher les cartes ! Bien sûr, c'est de là qu'elle donna l'alerte et nous fûmes donc rapidement avisés de l'événement. Entre temps, le mécanicien du club, présent, prit le véhicule de l'atelier et fonça le garer au milieu de la piste, histoire d'improviser une chicane et interdire tout décollage. C'est à cet instant que nous déboulèrent sur la piste, fiers des 80 km/h que pouvait nous fournir notre estafette poussive. Immédiatement, nous parvinrent à obstruer un peu plus l'aire de décollage en mettant en travers de la piste notre bel engin bleu … gendarmerie ! Paul, depuis l'avion avait compris qu'il était fait comme un rat mais ne put se résoudre à abdiquer. Il prit le manche, mit les gaz à fond et se lança sur la piste obstruée, sans s'apercevoir que les volets, baissés au maximum lors de l'atterrissage, étaient restés dans cette position. L'appareil évita le premier véhicule, prit de la vitesse, évita (malheureusement) notre belle estafette, et décolla à notre nez sans que nous puissions faire un seul geste. L'avion grimpa anormalement très fort, les volets baissés l'empêchant de prendre la vitesse nécessaire à un vol ordinaire. Il ralentit sa course, puis, tout à coup bascula vers l'avant et la loi de la gravité fit le reste. Le nez percuta la piste du haut de la trentaine de mètres d'altitude que l'avion avait atteint. Le bruit fût celui d'un tas de tôles froissées. L'appareil ne s'enflamma pas comme nous le redoutions et un silence impressionnant pris le relais. Nous nous précipitâmes vers l'épave, sûrs d'avoir à désincarcérer le pilote étourdi (dans les deux sens !). Durant notre course vers le crash, nous vîmes la porte, (ou ce qu'il en restait) s'ouvrir et stupéfaits, nous aperçûmes une silhouette titubante s'en extraire, l'arme à la main. Avant même notre riposte, un trait de lumière de bruit et de fumée nous dépassa à hauteur d'homme. Le mécano, qui s'était auparavant saisi du pistolet d'alarme des vols venait de tirer dans notre dos et vers le pilote armé une fusée de détresse rouge par réflexe de défense! J'ai pensé, en voyant ce trait de fumée zigzaguant sur une quarantaine de mètres au vol hasardeux d'un missile Sidewinder cherchant sa proie. Cette traînée fumante prit toutes les directions possible et, comme pour servir son tireur, redressa sa course pour aller percuter en pleine poitrine le pirate de l'air nous faisant face. Sous le choc et la chaleur dégagée par la fusée au phosphore, notre homme, encore sonné de sa descente vers le sol s'écroula en tentant de se débarrasser du missile brûlant. Immobilisé sans grande peine et soigné plus tard de légères contusions, il eut ainsi le privilège de passer en notre compagnie les deux jours en garde à vue réglementaires. Il nous confia qu'il avait en fait l'intention de mettre fin à ses jours mais qu'il avait voulu mourir aux commandes d'un avion. Pourquoi la Suisse ? Il n'a jamais pu s'expliquer et nous n'avons pas vraiment compris le but de cette destination. Nous avons même douté de son intention suicidaire. Il nous a quittés pour la maison d'arrêt sans satisfaire notre légitime curiosité. J'ai suivi cette affaire, pensant que cet homme, qui avait fait preuve d'une telle naïveté et une telle bêtise, serait reconnu irresponsable pénalement, non sanctionné et abstreint à un traitement psychiatrique. Hélas pour lui ! La justice voulu faire de ce cas unique en France un exemple et il fût condamné à 18 ans de prison ! Voilà. Triste histoire d'un malheureux passionné d'aéronautique dont la vie bascula deux fois : Lors d'une chute en moto et plus tard lors de celle d’un avion ![/quote]